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Le bouddhisme et le soi

Si Ramana Maharshi est ma référence « paternelle », mon père imaginaire pourrait-on dire[1], Bouddha constitue ma « mère imaginaire ». Une référence importante qui fait « refuge » dans mon parcours, tant son sourire est accueillant. Le sourire de l’ermite est inspiré de celui du Bouddha. Il exprime la paix intérieure, rappelant celui du nourrisson repu du lait de sa mère, qui  sourit aux anges quand on lui titille le menton. Cette expérience du sourire intérieur (le sourire est toujours intérieur) rappelle celle de Sakiamuni (le jeune prince que fut Bouddha) qui après avoir errer de grotte en grotte et de maître en maître dans une ascèse impeccable, va se rendre dans la plaine de Bodgaya, accepter le lait que lui propose une femme soucieuse de sa maigreur, s’asseoir sous un banyan sur un tapis de feuille, et parvenir enfin, après sept jours de recueillement dit la légende, à l’éveil lumineux et paisible qu’il avait tant chercher. Expérience initiatique de la vacuité qui le guidera dorénavant.

 

Qu’est-ce que le soi a à voir avec la vacuité ?

Une certaine lecture du bouddhisme affirme que le soi n’existe pas. L’être est sans réalité car la Réalité est vacuité. Cette lecture semble avoir créé un schisme entre les deux traditions, védique et bouddhiste. Rupture dogmatique qui m’apparaît, à l’aune de mon expérience personnelle du samadhi (appelée satori dans le zen), une querelle de mots peu utile.

 

Quelle est la nature de cette vacuité expérimentée dans le samadhi ? Sa nature est sans autre structure que le ressenti de paix, de lumière, d’amour. Or le soi est précisément ce niveau de notre être vacant de tout objet.

Samadhi, comme le soi, n’est pas vide, car la notion de vide renvoie à celle de plein et renvoient toutes deux à la dualité du mental. L’expérience de la conscience propre au samadhi, comme celle de soi, c’est la vacuité d’objet. Samadhi n’est que ressenti, aucune différenciation mentale ou imaginaire ne le traverse. C’est la raison pour laquelle il ne comporte aucun conflit, puisque tout objet, tout sujet y est absent.  Il est une autre réalité que la réalité commune / conscience de tous les jours. Pour revenir à l’image de la poupée gigogne, le soi sans objet contient le moi et le sujet objectaux. Ceux-ci en émergent en permanence, à longueur de journée et la nuit, dans nos  rêves. La conscience de la vacuité qui est pur ressenti sous-tend la conscience habituelle du je qui pense et est en relation avec les autres et les objets.

 

Notons au passage que le concept de pleine conscience est un terme  ambigu à cet égard. Pleine de quoi ? Nous y reviendrons

 

En ce sens, Védas et Bouddhisme parlent, selon nous, avec des mots différents, d’une même expérience, et la Réalité Ultime dont parle le bouddhisme n’est autre que le soi qui fonde l’être tel que tentent de l’évoquer les Védas. Complémentaires apparaissent dans l’expérience, la mère et le père, dans la vacuité du soi.

 

 

Pour aller plus loin

 

Ce qui est commun à ces deux traditions, c’est l’existence de deux formes de consciences. Et ce qui est souvent déroutant dans ces conceptions orientales de l’être, c’est le caractère « illusoire » dont se voit affublé la conscience commune que nous utilisons pourtant chaque jour. L’image de la poupée gigogne tente de répondre à ce caractère illusoire de la conscience quotidienne. Elle montre que cette conscience prendrait naissance dans un substrat  de nature différente que la pensée-parole, en profondeur, un substrat de pur ressenti  qui serait le fond de notre être et auquel nous ne prêterions pas attention parce que nous sommes centrés sur ce que nous faisons. Le nez sur le guidon, nous négligerions ainsi ce que nous sommes en profondeur, au lieu d’en tirer parti, avec des conséquences importantes pour ce qui nous arrive. Nous relier au soi serait alors nous nourrir de ce que nous ignorons que nous sommes.

 

Cette hypothèse sur la nature de ce que nous sommes et sur ce qui se déroule en permanence à notre insu justifie la nécessité de l’exercice méditatif. Méditer, qui tire son étymologie de médiquer, serait prendre soin de ce que nous sommes, en poussant plus loin la réflexion qui porte habituellement sur la poupée extérieure…  Ecouter ce qui s’élève de soi quand le je se tait.

Nous étaieront la prochaine fois notre hypothèse en abordant le questionnement sous un autre angle : comment naît notre conscience commune dans le développement du petit d’homme ? La face (lumineuse ?) de notre être et le logiciel du soi.

 

A bientôt. DM.

 

 

[1] Voir, dans l’onglet « Mes bouquins », l’ouvrage, co-écrit avec Judith Ollier Dressayre, « Le génogramme imaginaire, Liens du sang, liens du cœur »

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Commentaires: 19
  • #1

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:51)

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  • #2

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:54)

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  • #3

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:54)

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  • #4

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #5

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #6

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #7

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #8

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  • #9

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #10

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:55)

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  • #11

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:56)

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  • #12

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:56)

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  • #13

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:56)

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  • #14

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:57)

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  • #15

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:57)

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  • #16

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:58)

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  • #17

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:58)

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  • #18

    pHqghUme (lundi, 16 août 2021 06:59)

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  • #19

    Seb (dimanche, 02 janvier 2022 02:10)

    Je me questionne et me demande si le non-soi bouddhique n'est pas finalement compatible avec le soi. N'être pas ceci, n'être pas cela, ne signifie pas ne pas être.
    L'idée que le soi est une illusion signifie-t-il que nous n'existons pas ?
    Ce qui aiderait peut-être, c'est de ne pas confondre existence et essence.
    Ainsi pour moi le samadhi n'est pas vacuité de substance. Le samadhi se nourrit du réel. C'est une vacuité d'essence, un refus de fixer les choses en objets définis. Les phénomènes ne sont pas ceci ou cela. Ils existent libres de tout classement, de toute attribution, de tout langage. De toute appropriation. Il faut les prendre pour ce qu'ils sont, des choses en fuite et insaisissables. De la même façon, le soi n'est ni ceci ni cela. Il n'est pas le corps, il n'est pas le ressenti, il n'est pas l'esprit, il n'est pas un objet. Il n'est pas éternel, il n'est pas temporel, il n'est rien de dicible. Finalement le sutra du diamant qui expose la vacuité (d'essence) revient à développer la formule des upanisads : tu es cela. Un cela non déterminant, un cela absolument libre de définition .